Être Brisé

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Réflexions sur le livre d’Henri Nouwen

« Lettre à un ami sur la vie spirituelle »


Troisième mot clé: Être brisé

L’expérience de notre brisure est toujours hautement personnelle, intime, unique, nous dit Henri Nouwen dans son livre Lettre à un ami sur la vie spirituelle. Chaque être humain souffre d’une manière qui lui est propre. Nos souffrances nous appartiennent personnellement. Elles nous sont aussi uniques que notre élection (premier mot clé) et notre bénédiction (deuxième mot clé). Et c’est pourquoi devant une personne en souffrance, on ne peut que se tenir auprès d’elle en témoin respectueux, souvent silencieux, compatissant et plein de tendresse. Devant la souffrance de l’autre, les mots sont souvent de trop. Il suffit d’être là tout simplement.

coeur_brise

Nouwen écrit: La souffrance dont je suis le plus conscient sur une base quotidienne est celle du cœur brisé. Souvent la plus grande souffrance n’est pas nécessairement un handicap physique ou intellectuel, mais l’expérience de se sentir inutile, bon à rien, non reconnu et mal aimé. Nouwen propose deux moyens de réagir face à notre brisure. D’abord se lier d’amitié avec elle, ensuite la vivre sous le signe de la bénédiction. Faire face à sa souffrance et vivre avec elle est le chemin de la guérison.


Fiat

En soi, la souffrance est absurde. Impossible de lui trouver un sens, mais peut-elle prendre un sens? Puis-je moi avec ma liberté lui donner un sens, demande Nouwen. Sa propre expérience lui a appris que le premier pas vers la guérison n’était pas de fuir sa souffrance, mais plutôt de s’en approcher. Parce que pour Nouwen, notre brisure est une partie intime de notre être, au même titre que notre condition d’être choisis et d’être bénis. Il invite à oser surmonter notre peur et nous faire proche d’elle.

Dans la foi au Christ présent au plus intime de nous-mêmes, il nous est possible d’entrevoir un chemin de vie dans ce non-sens qu’est la souffrance. La prière de Jésus au jardin de Gethsémani est en deux temps. Le premier est un cri humain: « Que cette coupe s’éloigne de moi… » Puis tout de suite et en même temps, il dit: « Que ta volonté soit faite et non la mienne. » Dans ce deuxième temps de sa prière, Jésus reprend le mot de sa mère: Fiat – Qu’il me soit fait selon ta parole.

Dans l’Évangile nous trouvons trois fiat: celui de Marie à l’Annonciation, celui de Jésus dans la nuit de son agonie et le troisième fiat est le nôtre dans la prière du Notre Père: Fiat voluntas tua – Que ta volonté soit faite. Dans la pire angoisse, dans la pire détresse, il est toujours possible non pas forcément d’articuler « fiat » mais de le murmurer, de le bégayer au moins.


Vivre sa souffrance sous le signe de la bénédiction

Mère Teresa disait à ses sœurs: « Acceptez tout ce que Jésus donne et donnez tout ce qu’il prend. » En mettant notre souffrance sous le signe de la bénédiction, deuxième moyen proposé pat Henri Nouwen, au lieu de la mettre sous le signe de la malédiction, la source de notre brisure devient alors source d’espérance. Lorsque nous nous mettons à l’écoute de la voix du Père qui nous appelle « bien-aimé », il nous est possible de vivre notre souffrance non pas comme une confirmation de notre peur d’être sans valeur, mais comme une occasion de purifier et d’approfondir la bénédiction qui repose sur nous. Des fardeaux énormes et lourds deviennent faciles et légers lorsque vécus à la lumière de la bénédiction. La souffrance devient alors un lieu de croissance vers l’acceptation de soi-même tel que l’on est devant Dieu. C’est une expérience d’humilité et de dépouillement, un premier pas vers la véritable paix intérieure.