« Je vous exhorte par la tendresse de Dieu,
à offrir votre personne et votre vie
en sacrifice saint, capable de plaire à Dieu :
c’est là pour vous l’adoration véritable. »
Lettre aux Romains 12,1
Pour Jeanne Le Ber, la célébration de l’Eucharistie
se prolonge dans la liturgie du cœur : l’adoration et la supplication.
En cela, elle est l’héritière spirituelle des recluses qui l’ont précédée.
Les deux fenêtres
Les reclusoirs, habituellement adossés à une église, possédaient deux fenêtres : l’une des fenêtres ouvrait sur l’église et l’autre sur la rue. Ces deux fenêtres illustrent bien la double mission des recluses. D’une part, elles se retiraient dans la solitude pour se donner entièrement à la prière d’adoration et d’intercession : c’est la fenêtre ouverte sur l’Église. D’autre part, elles accueillaient les personnes qui venaient leur confier leurs difficultés, leurs peines : c’est la fenêtre ouverte sur la rue. La recluse était considérée comme celle qui parle à Dieu au milieu du peuple. On lui reconnaissait une autorité spirituelle.
Dans la maison de son père, Jeanne, de sa fenêtre, apercevait la lampe du sanctuaire de la chapelle de l’Hôtel-Dieu. Déjà à cette époque elle se prosterne devant la fenêtre et adore Celui qui est présent dans l’Eucharistie. À la Congrégation de Notre-Dame, chaque nuit la recluse se lève et fait une heure d’oraison, parfois deux, à genoux au pied de l’autel. Et quand « la louange était comme endormie, assoupie dans le silence de la nuit », Jeanne « comme une vigilante sentinelle prie pour sa patrie et pour toute l’Église. » Elle porte devant Dieu dans la prière les joies et les peines, les espoirs et les combats de ses compatriotes.
Ministère d’intercession
Aelred de Rievaulx exprime d’une façon saisissante le ministère d’intercession et de compassion de la recluse. « Quoi de plus utile que la prière ? Donne-la. Quoi de plus humain que la pitié ? Répands-la sans compter. Rassemble ainsi le monde entier au creux de ton amour. (…) À tous ouvre un cœur plein d’amour, verse pour eux tes larmes et répands tes prières. »[1]
Vigile de l’amour
Tenir, jour après jour, la vigile de l’amour dans l’obscurité de la foi ne fut pas chose facile pour notre recluse. « Son oraison mentale a été douce et tranquille dans les commencements mais plus de vingt ans avant sa mort, elle l’a passée dans une continuelle sécheresse, aridité et obscurité n’y ayant pour guide que la pure foi et pour soutien que l’accomplissement de la volonté de Dieu » nous relate son biographe. Là encore Jeanne comme une sœur aînée nous précède et nous indique la voie de l’humble fidélité.
[1] Aelred de Rievaulx, op. cit., no 28, p.113
Ce 6e article fait partie de la réflexion Prier à la manière de Jeanne Le Ber écrite par sœur Louise Marie Dupras, recluse missionnaire, et publiée dans le Cahiers 10 de l’Oratoire Saint-Joseph intitulé : Jeanne Le Ber, Recluse en Nouvelle-France, Lampe ardente, Sentinelle dans la nuit, 2001, pp. 89-97. Quelques modifications y ont été apportées afin de l’adapter pour le web.
francoisdureux57
Merci pour cet article qui m’a rappelé mon engagement dans le monastère spirituel! J’essaye d’y rester fidèle. J’aimerai savoir aussi, étant en France, comment on peut se procurer ce cahier 10 qui parle de Jeanne le Ber. En vous remerciant par avance. Sous le regard de Marie, en union avec le Christ, entre nous et avec tous…
Claire Taillon
Merci pour ces envois qui nourrissent notre spiritualité. Ce rappel de la valeur de l’oraison mentale par Aelred de Rievaulx, comme un acte de compassion et d’intercession par lequel Jeanne Le Ber a dédié sa vie, nourrit ma foi et mon espérance à travers les péripéties d’un monde bouleversé par les crises sociales, politiques et environnementales. Prier, à la suite de Jeanne Le Ber, c’est garder la tête hors de l’eau, dans les tourbillons de la vie. C’est retrouver la joie et la confiance en un Dieu qui soutient et qui libère.
raymondtanguay
Voilà un excellent rappel à la nécessité de l’adoration et de l’intercession pour nous et nos contemporains.
Martine Fradet
Je vous remercie pour ce texte inspirant et ressourçant qui illustre ma vocation profonde de laïque adoratrice missionnaire.