L’École française de spiritualité au Canada – suite


Jeanne Le Ber, la recluse


Jeanne naît à Ville-Marie en 1662, vingt ans après la fondation de la nouvelle colonie. Elle est donc canadienne pure laine, selon une vieille expression. Elle sera appelée par Dieu à une vie exceptionnelle.

À l’âge de dix-huit ans, elle vivra en réclusion, tout d’abord dans la maison paternelle, puis dans un petit appartement annexé à la chapelle des Soeurs de la Congrégation de Notre-Dame où Marguerite Bourgeoys l’accueille avec joie. Elle y vivra jusqu’à sa mort survenue en 1714.


Jeanne est imbue de la spiritualité de l’École française et c’est cette spiritualité qui la soutiendra tout au long de sa vie. Son unique directeur, du début à la fin, sera M. de Suéguenot, un Sulpicien.

Peinture du buste de Jeanne Le Ber

Peinture du buste de Jeanne Le Ber


L’adoration eucharistique

Vitrail de la Basilique Notre-Dame de Montréal

Vitrail de la Basilique Notre-Dame de Montréal

Photo : André Tremblay

On sait que Jeanne appelait le Christ dans l’Eucharistie sa pierre d’aimant et qu’à l’instar des recluses, ses devancières, elle avait dans son reclusoir une fenêtre toujours ouverte sur le tabernacle de la chapelle.


Or l’esprit d’adoration et d’offrande de soi, en communion avec Jésus, est le fondement de la spiritualité bérullienne.


Aussi n’est-on pas surpris de constater chez Jeanne Le Ber les fruits qui découlent d’une telle attitude d’âme et que, par son choix d’une vie de solitude absolue, elle porte à une très grande maturité: un dépouillement radical, un silence strict, une fidélité remarquable malgré une aridité intérieure persistante.


L’intercession

Une vie de prière ne saurait être authentique sans un amour du prochain et un souci de son bonheur temporel et éternel. C’est ce que les disciples de Bérulle et de Olier appellent l’esprit apostolique ou missionnaire.

Les biographes de Jeanne Le Ber mentionnent non seulement sa prière pour ses frères et sœurs mais également ses interventions lors de dangers qui menaçaient la colonie. Elle agit à sa manière de recluse: elle rassure ses compatriotes, leur dit de mettre leur confiance dans la Reine des Anges, gardienne de Ville-Marie, elle rédige une prière et brode même un étendard à l’effigie de la Vierge.


Sa charité s’étend aux Amérindiennes incapables de défrayer leur éducation. Elle prend en charge plusieurs d’entre elles et même sur son lit de mort elle pensera à verser une somme pour l’une d’entre elles.


Son travail de broderie pour parer les autels, art qu’elle avait appris chez les Ursulines, et sa confection de vêtements pour les démunis sont aussi une preuve de son ouverture aux autres. En ceci également, elle est fidèle aux recluses de jadis dont la deuxième fenêtre de leur reclusoir était grande ouverte sur le monde et sur ses besoins.


La Tradition des recluses

En regardant de près la spiritualité des recluses du Moyen Âge, on y trouve beaucoup de traits de ressemblance avec ce qui sera plus tard la spiritualité bérullienne. Les recluses auraient-elles contribué à préparer le courant spirituel de l’École française? Cela est fort possible si l’on se rappelle le rayonnement de certaines d’entre elles. De toute façon, Jeanne Le Ber a dû se sentir doublement à l’aise dans les deux traditions qui constituaient son héritage spirituel.



Notre-Dame de la Vie Intérieure


Notre-Dame de la vie intérieure
Statue Notre-Dame de la vie intérieure

M. Olier avait demandé au peintre Lebrun de lui faire une estampe de Notre-Dame de la Vie intérieure en suivant ses indications. On y voit l’Esprit Saint sur le coeur de la Vierge. Jésus fut formé en Marie par l’Esprit Saint. À son tour, Marie contribue à former Jésus en nos coeurs. Cette image représente bien la dévotion à la Mère du Verbe incarné selon la spiritualité de l’École française.

Grâce aux Sulpiciens, la dévotion à Notre-Dame de la Vie intérieure se répandit au Canada. Jeanne Le Ber s’est inspirée de cette Vierge pour plusieurs de ses broderies.



NOTE

Il y a plusieurs autres héritières et héritiers de la spiritualité de l’École française au Canada. Nous nous limitons ici aux femmes qui sont davantage reliées à notre histoire de Recluses Missionnaires.


Prochain article : Héritières de l’École française au Canada – Notre communauté des Recluses Missionnaires

  1. helene latendresse

    Merci de me faire découvrir cette femme de chez-nous que je ne connaissais pas, elle est inspirante, je me comprends mieux à travers elle car j’aime aussi ma solitude avec Jésus ma priorité, sans délaisser ma famille et mes
    relations.
    Merci