Sainte Mélanie la Jeune
Recluse à Jérusalem
Fille unique de Valerius Publicola et de Albina la Jeune, tous deux originaires d’Espagne, Mélanie naquit à Rome en 383 sous le nom de Valéria Mélania.
Elle était la petite fille de sainte Mélanie l’Ancienne (+410) qui, fuyant l’invasion des Goths en Italie, alla s’établir en Terre Sainte.
Celle-ci épaula Mélanie dans son cheminement de foi et sera l’inspiratrice de son établissement éventuel en Terre Sainte.
Née dans l’aristocratie romaine, Mélanie est la descendante d’une lignée ininterrompue de préfets urbains jusqu’à son grand-père paternel qui exerce cette magistrature sous l’empereur Julien (361-362). Sa mère appartient à la puissante famille païenne des Caeionii et par son père, Mélanie est membre de la gens Valerii. Bref, elle est l’héritière d’une des plus grosses fortunes de l’empire romain.
Conversion à la foi chrétienne
Rappelons qu’en 313 les persécutions cessèrent dans l’empire romain avec la reconnaissance officielle de la religion chrétienne par l’empereur Constantin.
La grand-mère paternelle de Mélanie, sa cousine et la fille de celle-ci, ainsi que d’autres dames de la haute aristocratie de Rome se convertirent au christianisme grâce aux exhortations enflammées de saint Jérôme, ainsi que par les récits des exploits ascétiques des moines d’Égypte. Elles abandonnèrent richesses et gloire pour se consacrer aux œuvres de bienfaisance et à l’ascèse.
Pas étonnant que la petite Mélanie en fut profondément influencée et développa le désir de la consécration religieuse dès son jeune âge. Mais à cause de son statut dans l’empire romain, elle fut donnée en mariage à un cousin, Valerius Pinianus, fils de Valerius Seuerus, préfet de Rome en 382.
Mariage
Le mariage eut lieu en 397 alors que Mélanie avait quatorze ans et Pinianus dix-sept. Suite à la cérémonie des noces, Mélanie exposa à son jeune époux son désir de vivre dans la chasteté. Mais pour satisfaire aux exigences et au prestige de leur rang, ils eurent deux enfants qui moururent en bas âge. Voyant dans ces décès prématurés un signe, Mélanie réussira à convaincre Pinianus de vivre désormais dans la continence parfaite et selon la voie monastique. Nous sommes en l’an 404 et elle a vingt ans.
Liquidation de ses biens
« Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres,
et tu auras un trésor dans les cieux, puis viens et suis moi. » (Mt 19,20)
Désirant suivre le Christ pauvre, Mélanie chercha à liquider tous ses biens, mais la tâche ne fut pas facile. Ses parents, membres influents du Sénat, faisait tout pour l’empêcher de réaliser son projet.
C’est finalement avec l’aide de l’impératrice que Mélanie et Pinianus pourront s’affranchir peu à peu de leurs nombreux domaines. Leurs propriétés s’étendaient de la Bretagne à l’Afrique et de l’Espagne à l’Italie.
Retirés en l’an 406 dans l’une de leur somptueuse villa située sur la Voie Appia, le jeune couple affranchit 8,000 de leurs esclaves leur donnant chacun trois pièces d’or. Ils distribuèrent en aumône à l’Église des territoires entiers où des monastères furent fondés. Pressés de quitter la Sicile en 410 par l’invasion des Goths, Mélanie et Pinianus s’établirent à Thagaste en Afrique (aujourd’hui Souk-Ahras en Algérie), où ils achevèrent la liquidation de leurs biens.
Début de vie monastique
Pendant les sept années passées dans cette ville, ayant pour évêque et ami saint Augustin, Mélanie fonda deux grands monastères. Celui des femmes comptaient cent trente vierges et celui des hommes, quatre-vingt frères. Elle établit une Règle de vie, d’abord pour elle-même.
Menant déjà une vie ascétique, la future recluse guida prudemment ses compagnes sur la voie du renoncement. Elle perfectionna sa connaissance de l’Écriture Sainte auprès de saint Alypius (ami de saint Augustin), lut des livres canoniques et des recueils d’homélies et parcourut la vie des Pères. Mélanie écrivait aussi sur de petits cahiers avec beaucoup de talent. Son sommeil se limitait environ à deux heures, après quoi elle se levait pour prier et veiller comme une sentinelle guettant l’aurore.
Désir de se rendre en Terre Sainte
Pendant ses années de vie monastique dans la ville de Thagaste, un désir habitait le cœur de sainte Mélanie. En 417, voulant aller plus loin dans la suite du Christ, Mélanie se rendit en Terre Sainte avec son époux et sa mère. En route, ils firent escale à Alexandrie où l’évêque saint Cyrille les accueillit.
Réclusion sur le Mont des Oliviers
Arrivée à Jérusalem, Mélanie vivant dans la plus extrême pauvreté, s’installa sous les portiques de l’Anastasis où elle resta de longues heures à contempler le rocher de la croix, aujourd’hui recouvert par l’église du Saint-Sépulcre.
Elle retrouva sa cousine Paula qui vivait auprès de saint Jérôme à Bethléem. Mélanie fit aussi la rencontre du moine Pélage qui l’informa de son désir de demeurer dans la communion catholique malgré sa négation de la grâce et du péché originel. Elle se référa à saint Augustin qui lui répondit en 418 par le double traité: De gratia (Sur la grâce du Christ) et De peccato (Sur le péché originel). C’est ainsi que Mélanie s’opposa avec force aux partisans du pélagianisme.
Entrée en réclusion complète
De retour de son expédition en Égypte pour y faire l’aumône, Mélanie entra en réclusion complète en 419, pour une période de douze ans, dans une cellule sur le Mont des Oliviers, ne recevant que sa mère, son époux et sa cousine Paula.
En 431, à la mort de sa mère, Mélanie sortit de réclusion et fonda un monastère sur le Mont des Oliviers. Il fut rapidement peuplé par quatre-vingt-dix vierges sur lesquelles elle n’assuma pas la direction, se contentant de leur donner des enseignements spirituels et se faisant la servante de toutes avec sollicitude et tendresse.
Prenant exemple sur la vie des Pères, Mélanie exhortait ses compagnes à la persévérance dans le combat spirituel, à la vigilance contre les pièges du malin, au zèle et à la concentration de l’intelligence dans la prière nocturne, mais surtout à la charité. Elle disait:
Sanctuaire Apostaleion
Toujours en 431, Mélanie fonda un sanctuaire l’Apostaleion également sur le Mont des Oliviers, près de la Grotte des Enseignements, où elle va inhumer Pinianus mort en 432.
Elle se retire pour une période de deuil de quatre ans, charge son disciple, le moine Gérontius (son futur biographe), d’installer un monastère d’hommes sur les lieux du sanctuaire pour y assumer une psalmodie perpétuelle.
Elle y assuma la direction spirituelle, fait exceptionnel dans l’histoire de l’Église. À l’occasion de la venue de l’impératrice Eudocie en 438, saint Cyrille d’Alexandrie vint à Jérusalem et dédia les sanctuaires fondés par Mélanie, en plus de l’église Saint-Étienne et de l’oratoire élevé sur le lieu de l’Ascension.
Tombée malade en fêtant la Nativité à Bethléem en 439, Mélanie livra son testament spirituel aux moniales, les exhortant à garder leurs lampes allumées, telles les vierges sages de l’évangile de Matthieu (23, 1-13). Au bout de six jours de maladie, à l’âge de 56 ans, elle s’endormit doucement en prononçant ces paroles: « Comme il a plu au Seigneur, voilà ce qui est advenu. » Des moines venus des monastères, des déserts et de toutes les extrémités de la Palestine célébrèrent une vigile.
Vénération
Depuis la mort de sainte Mélanie (également appelée Sainte Mélanie la Romaine), la Tradition grecque a toujours conservé sa mémoire vivante.
En 1884, deux manuscrits ont été découverts par le Cardinal Rampolla qu’il publie lui-même par la Presse Vaticane: en latin, dans l’Escorial et en grec, conservé à la Librairie Barberini. En 1905, le Cardinal Rampolla publie la vie de sainte Mélanie la faisant ainsi connaître davantage dans la Tradition latine.
Apostoleion
Le monastère de Sainte Mélanie fut détruit vers 614, lors de l’invasion perse. Peu avant la Première Guerre Mondiale (1914-1918), des fouilles avaient été effectuées par les Pères Blancs sur le lieu de la Basilique Apostoleion. Il y eut une tentative de restauration qui aboutit à la construction d’un Carmel où la prière du Notre-Père est lisible sous forme de mosaïque dans près de 150 langues. Ceci rappelle l’enseignement donné par Jésus à ses disciples sur le Mont des Oliviers.
Patronne des bouquinistes
Le 30 avril 2006, à Fontenoy-la-Joûte en France, une statue de Sainte Mélanie la Jeune, dite Mélanie-le-Plumet sculptée par Michel Derouvois, a été dévoilée lors du 10e anniversaire de la fondation du Village du livre.