Tu m’as ouvert l’oreille

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« Tu m’as ouvert l’oreille »

Dans cette cinquième réflexion sur « Un cœur qui écoute », nous approfondirons trois textes bibliques intimement liés ensemble : le Psaume 40, versets 7 à 9; la Lettre aux Hébreux au chapitre 10; et le chapitre 50 du Livre d’Isaïe.

La Tradition de l’Église y a reconnu le Christ dans ces passages. Elle nous invite à entrer comme Jésus dans ce cheminement d’intériorisation de l’Alliance voulue et désirée par Dieu le Père.


PSAUME 40 (39), 7-9


7 Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice,
tu as ouvert mes oreilles;
tu ne demandais ni holocauste ni victime,
8 alors j’ai dit : « Voici, je viens.

« Dans le livre, est écrit pour moi
ce que tu veux que je fasse. 
9 Mon Dieu, voilà ce que j’aime :
ta loi me tient aux entrailles. »

Lettre aux Hébreux 10, 5-7


5 Aussi, en entrant dans le monde, le Christ dit : Tu n’as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m’as formé un corps.

Tu n’as pas agréé les holocaustes ni les sacrifices pour le péché ;

7 alors, j’ai dit : Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté, ainsi qu’il est écrit de moi dans le Livre.


Les versets 5 à 7 du chapitre 10 de la Lettre aux Hébreux reprennent les versets centraux du Psaume 40 en les attribuant au Christ. Le Père a « ouvert les oreilles » de son Fils (Ps 40,7) pour que celui-ci écoute profondément ce qui est écrit de lui dans le Livre (Ps 40,8), c’est-à-dire dans la Loi et les Prophètes.


S’étant reconnu dans ces versets, Jésus exprime ses sentiments d’abandon à la volonté de son Père, et cela depuis son Incarnation – « tu m’as formé un corps » (He 10,5) jusqu’à sa mort et sa résurrection.  


À la place du sacrifice rituel de la première Alliance, le Père fait comprendre que le sacrifice qui lui plaît est celui d’une obéissance enracinée dans l’amour. Les prophètes ont annoncé cette intériorisation du sacrifice, le Christ l’assume entièrement. Les offrandes et les holocaustes n’étaient que le symbole de l’oblation intérieure, c’est-à-dire du don de soi : « voici, je viens » (Ps 40,8).


« Chaque matin, il éveille mon oreille »

Le passage du livre d’Isaïe au chapitre 50 est proposé comme première lecture de la fête de l’Annonciation célébrée le 25 mars. Cet extrait du « Chant du Serviteur » est également médité pendant le temps du carême et plus particulièrement la Semaine Sainte.


Isaïe 50, 4-7


4 Le Seigneur mon Dieu m’a donné le langage des disciples, pour que je puisse, d’une parole, soutenir celui qui est épuisé. Chaque matin, il éveille, il éveille mon oreille pour qu’en disciple, j’écoute. 5 Le Seigneur Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. 6 J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas protégé mon visage des outrages et des crachats. 7 Le Seigneur Dieu vient à mon secours : c’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c’est pourquoi j’ai rendu mon visage dur comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu.


Pour retrouver la sève de l’Alliance avec son peuple, Dieu envoie son Serviteur et chaque matin, il éveille son oreille pour que celui-ci écoute (Is 50,4). Jésus, qui s’est présenté comme serviteur, ne s’est pas dérobé à la parole du Père, il ne s’est pas révolté, parce qu’il est son Fils.

Dans son identité filiale, Jésus refaçonne notre nature humaine blessée pour lui redonner son intégrité dans laquelle elle a été créée. C’est pour cela qu’il s’est incarné, qu’il n’a pas dédaigné de prendre notre chair, afin de la renouveler dans sa nature profonde et véritable.

En lui, nous retrouvons notre vraie identité de « fils » et de « fille » du Père, à nouveau capable d’une écoute filiale au plus profond de notre cœur.


L’obéissance

Ce mot peut fait frémir nos oreilles, au lieu de les disposer à l’écoute, suivant nos expériences de vie. Une purification ou une guérison est souvent nécessaire.

Dans la racine latine oboedio, nous retrouvons le mot « audio » : écouter. Écouter, c’est faire attention, c’est prêter l’oreille pour entendre. Jésus, à travers l’écoute des Écritures, a entendu ce qui était écrit de lui : le Fils de l’homme doit être livré, mis à mort pour ressusciter le troisième jour (Luc 9,22).

Tous les hommes ont peur de la mort. Le Christ a pris sur lui cette peur en acceptant la chair pour être crucifié comme il l’a été. Il a lutté pour moi et remporté pour moi la victoire. Il s’est chargé de nos faiblesses… Ce n’est pas une autre chair que cette chair humaine dont il a pris la charge.

Commentaire de saint Ambroise sur le Psaume 40


Dans son renvoi au Psaume 40, 6-8, la Lettre aux Hébreux trouve l’expression de cet acte d’obéissance de Jésus à l’égard du Père, qui s’accomplit dans l’incarnation et sur la croix : « De sacrifice et d’offrande, tu n’as pas voulu. Mais, tu m’as façonné un corps… Je suis venu, ô Dieu, pour faire ta volonté. » Par son oui, à la naissance du Fils de Dieu dans son sein par la vertu de l’Esprit Saint, Marie met son corps à la disposition de Dieu pour qu’il devienne le lieu de son agir. Ainsi, dans cette parole, la volonté de Marie coïncide avec la volonté du Fils. À l’unisson de ce oui, « tu m’as façonné un corps », la naissance de Dieu devient possible. Pour qu’il y ait entrée de Dieu dans le monde, il faut toujours ce oui marial, cette coïncidence entre notre volonté et sa volonté.

Commentaire du Cardinal Ratzinger (Benoît XVI),

Un Chant nouveau pour le Seigneur, p. 72-73

Avec les yeux fixés sur Jésus, contemplant sa disposition d’écoute intérieure, apprenons comme Marie à faire de notre vie un « oui » d’amour au Père, avec confiance!