L’Eucharistie et le mystère d’unité(1)

Classé dans : Le mystère eucharistique | 1
L’EUCHARISTIE

ET LE MYSTÈRE D’UNITÉ

Première partie

 

Lecture biblique : Prière sacerdotale Jn 17, 1-11

1 Ainsi parla Jésus, et levant les yeux au ciel, il dit: Père, l’heure est venue, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie 2 et que, selon le pouvoir que tu lui as donné sur toute chair, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés! 3 Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. 4 Je t’ai glorifié sur la terre, en menant à bonne fin l’œuvre que tu m’as donné de faire. 5 Et maintenant, Père, glorifie-moi auprès de toi de la gloire que j’avais auprès de toi, avant que fût le monde. 6 J’ai manifesté ton nom aux hommes, que tu as tirés du monde pour me les donner. Ils étaient à toi et tu me les as donnés et ils ont gardé ta parole. 7 Maintenant ils ont reconnu que tout ce tu m’as donné vient de toi; 8 car les paroles que tu m’as données, je les leur ai données, et ils les ont accueillies et ils  ont vraiment reconnu que je suis sorti d’auprès de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé. 9 C’est pour eux que je prie; je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi, 10 et tout ce qui est à moi est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi, et je suis glorifié en eux. 11 Je ne suis plus dans le monde; eux sont dans le monde, et moi, je viens vers toi. Père saint, garde-les dans ton nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous.

 

La prière sacerdotale : une synthèse de la vie du Christ

Cette prière de Jésus au soir du Jeudi Saint représente le grand mouvement perçu par l’apôtre saint Jean dans la pensée, la prière et le cœur de Jésus. C’est une synthèse terminale de la vie du Christ. Une grande action de grâce qu’il fait monter vers le Père, en contemplant cette réalisation que le Père lui a permis d’accomplir, pour tout ce que le Père lui avait donné à faire. Dans cette prière, nous avons le sentiment que c’est une contemplation du plan de son Père. Jésus transfigure peu à peu cette contemplation dans un regard, d’abord sur ses disciples, les Onze – puisque Judas n’est plus là – et au-delà sur l’Église et sur le monde. C’est par vagues successives que le Christ prie.

D’abord Jésus glorifie l’Absolu du Père: « Père, l’heure est venue, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie. » Si le Père glorifie le Fils, c’est pour que le Père soit uniquement glorifié: « Je t’ai glorifié, maintenant glorifie-moi, pour que je puisse continuer dans ma sainte humanité transfigurée par ma glorification à te glorifier éternellement. » Il est important de souligner que toute prière commence par une attitude de glorification du Père, de regard vers le Père, de louange, d’adoration, d’action de grâce.

Nous pouvons nous interroger pour savoir comment NOS prières se passent. Est-ce que ma prière est d’abord une grande louange au Père? Est-ce de l’adoration?

Après avoir regardé toute cette immensité du plan du Père dont il rend grâce, Jésus regarde ensuite ceux qu’il lui a donnés: « Tu les as tirés du monde pour me les donner. C’est à eux que j’ai confié ma parole et je les ai gardés. Mais maintenant que je vais vers toi, que va-t-il se passer? Père, garde-les. Garde-les en ton Nom, c’est-à-dire en ta réalité paternelle. » Et comment va-t-il les garder? Jésus demande à son Père de les garder dans l’unité. S’ils se dispersent, c’est fini. « Alors, Père, je te demande, garde-les: qu’ils soient un COMME NOUS SOMMES UN. »

 

Que ma joie soit en eux

Jésus continue de se préoccuper de ses disciples. Il demande encore une chose au Père pour eux: « Qu’ils aient ma JOIE et ma joie en plénitude. » Donc, les disciples d’hier et d’aujourd’hui sont appelés à rayonner la joie, celle dont Jésus a parlé: « Je ne vous donne pas ma joie comme le monde la donne, mais je vous donne MA joie ». Puis il continue sa prière : « Je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils ne sont pas du monde comme moi je ne suis pas du monde. Alors, je ne te demande pas de les enlever du monde mais de les garder du Mauvais qui est le diviseur. Ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde. » Jésus insiste sur ce point. Vient ensuite cette parole importante: « Consacre-les par ta vérité. Ta parole est vérité. Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’eux aussi soient sanctifiés dans la vérité » (Jn 17,19). Jésus demande beaucoup pour ses disciples.

La_Prière_Sacerdotale_1900-1_Eugène Burnand
La Prière Sacerdotale de Eugène Burnand

Il insiste aussi sur le COMME. Dans saint Jean « comme » signifie qu’on entre en participation: « qu’ils soient un COMME nous sommes uns », c’est-à-dire qu’ils entrent en communion avec l’unité, l’amour que nous avons l’un envers l’autre. Il n’y a pas deux missions: celle de Jésus, et à côté une autre, celle des apôtres. Et de même que Jésus s’est sanctifié lui-même pour se dédier tout entier à l’œuvre donnée par le Père, de même il consacre ses disciples en vérité pour ensuite les envoyer dans le monde poursuivre cette œuvre.

 

Père, qu’ils soient UN

Et Jésus va étendre sa prière au-delà des murs du Cénacle où il y a les Onze: « Je ne prie pas seulement pour eux, je prie aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. » Il n’y a qu’une chose qu’il demande à son Père, une seule: « Que tous soient un, Père, comme tu es en moi et que moi je suis en toi. Qu’ils soient un en nous eux aussi, afin que le monde croie que tu m’as envoyé. Je lui ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un: moi en eux, comme toi en moi, pour qu’ils arrivent à l’unité parfaite et qu’ainsi le monde puisse croire que c’est toi qui m’as envoyé et que je les ai aimés comme tu m’as aimé. Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi. Père, que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux » (Jn 17,20-23).

Pendant son ministère, Jésus a laissé à ses apôtres, et par conséquent à son Église, une foule d’enseignements: sur l’esprit du Royaume (les béatitudes) ou sur ce qu’est le Royaume: « Le Royaume des cieux est semblable à.. » Il a donné un enseignement sur l’amour qui pardonne: la brebis perdue, un enfant qui revient à la maison. Un enseignement sur le pardon fraternel: « Si ton frère pèche contre toi, pardonne-lui soixante-dix-sept fois sept fois. » Il a donné un enseignement sur la prière: « Quand vous priez, dites: « Notre Père, qui es aux cieux. » Il a donné son commandement de l’amour: « Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » Un enseignement sur l’Eucharistie au chapitre 6 de saint Jean et un enseignement sur la mission.

Mais JAMAIS IL N’A DONNÉ UN ENSEIGNEMENT SUR L’UNITÉ. La seule fois où Jésus en parle c’est au soir du Jeudi saint. Et il n’en parle pas à ses disciples, mais à son Père. Cette façon d’agir de Jésus doit nous interroger. Sa prière au Père reste pour nous assez mystérieuse. L’unité, la seule chose qu’il demande à son Père, il en parle dans une sorte de contemplation: « Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi. » Jésus compare l’unité qu’il désire à cet échange d’amour, de vie, de connaissance, de cette osmose infinie qui se passe entre le Père et le Fils, à cet échange incessant de vie entre les Personnes divines dans la communion du Saint-Esprit.

Est-ce que cela met l’unité sous nos prises? Qui prétendra mettre la main sur le mystère du Seigneur, sur le Père se donnant à son Fils? Qui peut décrire cet amour, cette donation, cette vie, cette joie et cette paix qui s’échangent entre les Personnes divines? 

Nous comprenons tout de suite avec cette prière de Jésus que l’Église se trouve placée devant une immensité et qu’elle ne peut pas prétendre avoir compris tout ce qu’il y a dans ces mots de Jésus. Si elle avait compris, elle serait dans la béatitude. Elle serait entrée complètement dans l’unité d’échange d’amour du Père et du Fils, ce qui se produira au moment où le Christ sera tout en tous, où le Christ remettra à son Père le Royaume parce que ce sera la transfiguration totale. L’Esprit seul « scrute les profondeurs de Dieu » (1 Co 2). Par conséquent l’Église, et chacun d’entre nous, ne peut que demander au Seigneur de nous faire entrer dans la lumière de l’Esprit pour voir un peu mieux les exigences spirituelles de ce que signifie le mot UNITÉ. Parce que ce n’est pas un mot, c’est une réalité.

 

Deuxième partie le mois prochain:  

Pour que le monde croie – Laisser le Christ prier en nous

————————–

Cette série de réflexions sur le mystère eucharistique sont des extraits de conférences données à la communauté par le Père Pierre Michalon, sulpicien de France (1911-2004). Il a été expert au Concile Vatican II dans le Secrétariat pour l’unité des chrétiens et directeur du centre Unité chrétienne à Lyon de 1954 à 1991.

 

  1. Marie-Josée Chouinard

    Je découvre votre site aujourd’hui. Je suis catéchète pour le parcours de la confirmation et à la rencontre traitant de la prière sous toutes ses formes nous abordons la petite histoire de votre communauté.
    J’ai eu le gout de vous connaitre davantage et me voilà lisant l’Eucharistie, le mystère d’unité. Ce texte m’a fait beaucoup de bien, je me suis obligée à ce temps d’arrêt, c’était trop bon et il amène à ce recentrer sur l’essentiel.
    Merci!
    Que Jésus vous bénisse et vous protège!