Les Maîtres – Pierre de Bérulle


1575 – 1629


Peinture de Phillipe de Champaigne

(1602-1674)

SA VIE


Pierre de Bérulle est né en 1575 trois ans après le massacre de la Saint-Barthélemy, à Cérilly, d’une famille appartenant à la petite noblesse et à la magistrature. Aîné de quatre enfants, il perdit son père à l’âge de 10 ans. Il fit ses études chez les Jésuites au Collège de Clermont. Par la suite, il entreprit un cours de théologie et fut ordonné prêtre en 1599, alors qu’il avait 24 ans.

Il fréquenta le salon de sa cousine Madame Acarie où l’on échangeait sur un renouvellement de la foi, sur la fondation d’Ordres nouveaux et sur la réforme du clergé.

C’est là qu’il rencontra le capucin anglais Benoît de Canfeld, consulté comme la plus grande autorité mystique de son temps, et dont la Règle de Perfection était toute orientée sur la volonté de Dieu.

Il se fit guider par Dom Beaucousin, qui le conduisit à la mystique des essences.

Inspiré par Mme Acarie, Bérulle introduisit en France les Carmélites réformées. À l’école de ces dernières s’effectua chez lui le passage d’une mystique abstraite « de suspension » à une spiritualité « d’imitation » du Verbe Incarné.

Homme politique et diplomate de son époque (on lui confia plusieurs missions diplomatiques), Bérulle s’attacha de façon privilégiée à la sanctification des prêtres. Inspiré de Philippe de Néri en Italie, encouragé par Mme Acarie et par le Père Coton, il fonda l’Oratoire en France en 1611, approuvé deux ans plus tard par le Pape Paul V.


En même temps, Pierre de Bérulle suscita un courant spirituel nourri de réflexions théologiques et centré sur la personne de Jésus, le Verbe Incarné. Sa pensée spirituelle donnera naissance aux Oratoriens, aux Sulpiciens et aux Eudistes.


SA SPIRITUALITÉ


L’essentiel de l’héritage bérullien est constitué de quatre aspects importants que l’on retrouve également chez ses disciples, sous des facettes particulières:

  • le sens de Dieu et le sens de l’adoration;
  • le christocentrisme mystique;
  • une tendre dévotion à Marie;
  • le souci de la sainteté des prêtres.

Sens de Dieu et de l’adoration

En ce qui a trait au sens de Dieu, les mystiques rhéno-flamands (École allemande) ont exercé sur Bérulle une forte influence. L’absolu de Dieu, sa transcendance et sa sainteté contribuent à former chez lui ce sens de la grandeur de Dieu et de l’adoration. Nous sommes des rien mais des rien en capacité de Dieu. Et, pour lui, adorer c’est prier en suppliant pour autrui.


Christocentrisme mystique

Son sacerdoce sera au cœur de sa vie et de sa mission. Le désir de sanctification des prêtres s’enracine chez lui dans son christocentrisme. Il a découvert dans l’abaissement du Verbe incarné le modèle de l’entière soumission à Dieu. Le centre, la source de la vie chrétienne, c’est le mystère de Dieu fait homme. Par l’Incarnation, le Christ devient le seul grand-prêtre, capable d’une offrande infinie à Dieu. Les prêtres doivent donc s’identifier à Jésus-Christ, en devenant de vivantes images pour coopérer à son oeuvre.

Pour adhérer au Christ, il faut le contempler en chacun de ses états, dans les mystères de sa vie. Parmi les mystères que Bérulle proposera, celui de l’Incarnation sera au coeur de sa contemplation et de son adoration. L’état d’enfance est pour lui le comble de l’anéantissement: le Verbe, la Parole devenue muette. C’est là que s’enracine sa dévotion si profonde à l’égard du Saint-Sacrement et de la Vierge Marie.


Écrit de Bérulle

Jésus, accomplissement de notre être

(…) Nous devons regarder notre être comme un être manqué et imparfait, comme un vide qui a besoin d’être rempli, comme une partie qui a besoin d’être accomplie, comme une table d’attente* qui attend l’accomplissement de celui qui l’a faite, comme une couche première en la main d’un excellent peintre qui attend les vives et dernières couleurs.

Et nous devons regarder Jésus comme notre accomplissement, car il l’est et le veut être, comme le Verbe est l’accomplissement de la nature humaine qui subsiste en lui… (Opuscule de Piété 144, 1, col.1180-1181).

*Cette expression désigne une pierre réservée en vue d’une inscription.


Prochain article : Les Maîtres – Charles de Condren


2 Responses

  1. Huguette Lévesque CND

    Fort intéressant. Cet écrit confirme les sources de notre spiritualité avec Marguerite Bourgeoys!
    Grand merci!
    Huguette Lévesque CND

  2. Denise Bilodeau

    J’aime bien son comment adorer en intercession pour les autres et nos proches.