L’EUCHARISTIE
REPAS DU SEIGNEUR
Le Christ a institué l’Eucharistie au cours d’un repas. Il ne s’agit pas de n’importe quel repas. Celui-ci se caractérise par sept points : 1. Repas d’adieu – 2. Repas religieux – 3. Repas d’alliance – 4. Repas dans un contexte pascal – 5. Repas du Seigneur – 6. Repas sacrificiel – 7. Repas eschatologique.
5. REPAS DU SEIGNEUR
Le repas de la Dernière Cène est un repas où le Seigneur invite à sa table. Voilà un premier sens de cette expression « Repas du Seigneur ». Et l’autre sens est que c’est le repas où le Seigneur se donne. Le « Repas du Seigneur » veut donc dire deux choses : le repas appartenant au Seigneur où il invite, et le repas où lui se donne.
L’expression « le Seigneur » désigne, dans tout le Nouveau Testament, LE CHRIST GLORIFIÉ. Ce n’est pas le repas de Jésus, mais du Seigneur. « Ce Jésus que vous, vous avez crucifié, le Père l’a ressuscité et lui a donné le nom de Seigneur » dira saint Pierre le jour de la Pentecôte (Ac 2,36). C’est son titre maintenant. Alors lorsque la communauté se réunit pour célébrer le Repas du Seigneur, c’est le repas du RESSUSCITÉ. C’est le Ressuscité qui invite à sa table et c’est le Ressuscité qui est la nourriture de ce repas.
Repas religieux juif
Dans le repas religieux juif, on mange AVEC Dieu pour rester dans le repas d’Alliance. Le repas célébré au Sinaï en souvenir de la sortie d’Égypte, est un repas où Dieu mange avec son peuple, ou plus exactement son peuple mange avec lui. Lorsque l’Alliance est conclue, Moïse prit le sang et en aspergea le peuple (Ex 24, 8-11).
Ce repas d’alliance du Sinaï où Dieu avait invité à sa table Moïse et les soixante-dix anciens à manger et à boire avec lui, scellait définitivement l’alliance. Cette image se retrouve dans le culte prévu dans le Temple. Au chapitre 24 du Lévitique, on nous parle de l’organisation du culte : comment construire le sanctuaire, comment célébrer les différentes fêtes, comment se vit le sabbat, etc… Dans le sanctuaire, il y avait le Saint des Saints avec seulement l’arche de l’alliance et là Yahvé, invisible, était assis sur les ailes des chérubins. Personne ne pouvait y entrer, sauf le grand prêtre avec le sang des boucs d’expiation. Devant, il y avait le Saint avec l’autel des parfums et la table des pains de proposition (Lv 24, 6-9):
Alors Dieu parle à Moïse: Tu prendras de la fleur de farine et tu en feras cuire douze gâteaux, chacun de deux dixièmes. Puis tu les placeras en deux rangées de six sur la table pure qui est devant Yahvé. Sur chaque rangée tu déposeras de l’encens pur. Ce sera l’aliment offert en mémorial, un mets pour Yahvé. Les enfants d’Israël les fourniront à titre d’alliance perpétuelle; ils appartiendront à Aaron et à ses fils, qui les mangeront en un lieu sacré, car c’est pour lui une part très sainte des mets de Yahvé. C’est une loi perpétuelle.
Donc chaque sabbat, ces pains sont renouvelés et offerts EN MÉMORIAL. Quant au bout de huit jours, Aaron et ses fils mangeront cette nourriture appartenant à Yahvé, ils la mangeront en communion avec lui.
1 Corinthiens 11, 17-34
Dans sa 1re Lettre aux Corinthiens, Paul argumente au chapitre 11 contre les abus de cette Église de Corinthe où, dans la célébration de l’Eucharistie, on fait n’importe quoi n’importe comment. Les gens ne comprennent pas que c’est le REPAS DU SEIGNEUR. Il leur dit ceci aux versets 20 à 22:
Lors donc que vous vous réunissez en commun, ce n’est plus le Repas du Seigneur que vous prenez. Dès qu’on est à table en effet, chacun prend d’abord son propre repas, et l’un a faim, tandis que l’autre est ivre. Vous n’avez donc pas de maisons pour manger et boire?
1er sens: le Seigneur invite
Paul oppose « votre propre repas » et « le Repas du Seigneur ». Il prend position très nettement: pour vos repas à vous, vous avez vos maisons. Mais pour l’Eucharistie, c’est le Seigneur qui vous invite, ce n’est pas à vous d’organiser le repas.
C’est donc un repas préparé par le Seigneur lui-même, le Christ glorifié. Un repas qui n’est autre que lui-même. Et nous allons le recevoir communautairement. Ceci est le deuxième sens de « Repas du Seigneur ».
Pour moi, en effet, j’ai reçu du Seigneur ce qu’à mon tour je vous ai transmis: le Seigneur Jésus, la nuit où il était livré, prit du pain et, après avoir rendu grâce, le rompit et dit: « Ceci est mon corps, qui est pour vous; faites ceci en mémoire de moi. De même, après le repas, il prit la coupe, en disant: Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang; chaque fois que vous en boirez, faites-le en mémoire de moi. (1 Co 11,23-25)
En conclusion
Le repas eucharistique ne peut pas être réduit à un repas purement fraternel. Si Jésus avait voulu créer un repas fraternel où la communauté se réchauffe le cœur, puis évoque des souvenirs, et bien, il n’aurait fait rien de plus que ces repas qui existaient déjà. Nous en avons la preuve par les écrits de Qumran. Le repas célébré par Jésus n’a pas été un repas profane, mais un repas RELIGIEUX.
Par conséquent, historiquement, nous n’avons jamais pu prouver que l’Église primitive – excepté quelques sectes aberrantes — célébrait l’Eucharistie au cours d’un repas ordinaire. Nous parlons parfois des « agapes », mais il semble que c’était plutôt des repas fraternels où il n’y avait pas d’Eucharistie. Il n’y a aucune preuve que l’Eucharistie ait été célébrée dans des communautés chrétiennes au milieu d’un dîner ou d’un souper. Le danger de toujours est d’organiser les célébrations eucharistiques comme si elles nous appartenaient. Or ce repas ne nous appartient pas, il n’appartient même pas à l’Église, il appartient uniquement au Christ Jésus.
Le repas eucharistique exprime une intimité avec le Christ. Cette intimité est soulignée sous les deux aspects de la symbolique du repas, à savoir que Jésus se donne lui-même sous forme de nourriture pour que nous le mangions et alors, il nous saisit du dedans. Par conséquent, cette symbolique du repas joue ici pour l’Eucharistie en nous montrant qu’elle nous conduit à dépasser les limites de notre vie. Le repas eucharistique signifie que nous acceptons d’entrer dans l’inexprimable du mystère, dans les dimensions d’une réalité qui va au-delà de nos pures possibilités humaines. Entrer en intimité avec le Seigneur c’est entrer dans plus grand que soi, dans une libération de toutes nos pauvretés, de toutes nos impuissances.
Prochain article: Repas sacrificiel
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