L’Eucharistie, mémorial du Christ(2)

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L’EUCHARISTIE

MÉMORIAL DU CHRIST

2e Partie

 

Comment célébrer ce mémorial

La deuxième partie de cette réflexion sur l’Eucharistie – mémorial du Christ portera sur: Comment ce mémorial sera-t-il célébré? Encore une fois, l’acte du Jeudi Saint, ne sera pas celui du Vendredi Saint. Jésus ne dit pas: Vous FEREZ cela en mémoire de moi. Ce qu’il est en train de faire dans cette soirée du Jeudi Saint, c’est de cela qu’il demande de faire mémoire. Il ne dit pas: Mon sang qui SERA versé, mais bien: Mon sang versé ACTUELLEMENT pour vous – Mon corps donné ACTUELLEMENT pour vous. Et non pas celui qui sera donné demain dans les rues de Jérusalem et au Golgotha, mais celui qui est donné maintenant sous les signes du pain et du vin.

Évidemment, l’acte du Jeudi Saint est en référence à cet acte historique du Vendredi Saint. Ce que Jésus accomplit dans la chambre de Jérusalem avec ses disciples est une anticipation sur le sens PROFOND de ce qu’il vivra le lendemain. Le Jeudi Saint et toutes les célébrations eucharistiques qui suivront sont suspendus à l’attitude profonde, au sens total, que Jésus vivra dans sa relation au Père le Vendredi Saint. De cet acte violent d’assassinat, Jésus en fera une offrande, un don de lui-même:

Personne ne me prend ma vie, je la dépose de moi-même.
J’ai le pouvoir de la déposer et le pouvoir de la reprendre;
tel est l’ordre que j’ai reçu de mon Père (Jn 10).

 

Beaucoup de faux problèmes sur le mémorial du Christ sont éliminés lorsqu’on a bien saisi, d’un côté, ce que signifie ce mémorial et de l’autre, que ce qui est célébré, c’est l’acte du Jeudi Saint. Par conséquent, actuellement le Christ perpétue son ministère de grand prêtre par sa présence auprès du Père. Il ne recommence pas ce qu’il a fait une fois pour toutes. Le Christ ne pose plus d’acte sacerdotal, d’acte sacrificiel et prophétique, il a tout accompli: « J’ai achevé l’œuvre que tu m’avais donné à faire». Il est simplement près de son Père comme grand prêtre qui présente ce qu’il a accompli en faveur des hommes.

 

Une fois pour toutes

Ce n’est pas, en effet, dans un sanctuaire fait de main d’homme, simple copie du véritable, que Christ est entré, mais dans le ciel lui-même, afin de paraître maintenant pour nous devant la face de Dieu. Et ce n’est pas afin de s’offrir lui-même à plusieurs reprises, comme le grand prêtre qui entre chaque année dans le sanctuaire avec du sang étranger. Car alors il aurait dû souffrir à plusieurs reprises depuis la fondation du monde. En fait, c’est UNE SEULE FOIS, à la fin des temps [nous sommes actuellement à la fin des temps; depuis que le Christ est venu, il n’y a plus rien à attendre] qu’il a été manifesté pour abolir le péché par son propre sacrifice. Et comme le sort des hommes est de mourir une seule fois, après quoi vient le jugement, ainsi le Christ fut offert UNE SEULE FOIS pour enlever les péchés de la multitude. Et il apparaîtra une deuxième fois, sans plus de rapport avec le péché, à ceux qui l’attendent pour le salut (He 9, 24-28).

 

Si c’est « une fois pour toutes », alors le Christ ne pose plus d’acte sacrificiel. Mais l’Église pose des ACTES SACRAMENTELS qui sont des SIGNES. Des signes actualisant pour nous dans telle église ou telle chapelle, en un point du temps, ce qui est éternisé depuis la glorification de Jésus. Lorsque nous voyons la réalité ainsi, nous n’avons pas le droit de manipuler n’importe comment ce que le Christ a accompli. L’Église doit être en attitude d’obéissance pour être fidèle à cet acte sacramentel que Jésus a posé le premier et que maintenant elle pose à son tour. Si le Christ actualise son acte du Jeudi Saint par les actes sacramentels de l’Église, c’est pour nous entraîner toujours dans le sillage de son retour au Père, nous et le monde.

Se donner à son tour

Afin d’unir la réflexion sur l’Eucharistie comme action de grâce au Père et l’Eucharistie comme mémorial du Christ (1ère partie), voici une petite anecdote historique intéressante. Saint Justin, prêtre romain originaire de Samarie et mort martyr vers le milieu du IIe siècle, raconte comment l’Eucharistie se célébrait:

Après que les chrétiens ont reçu le pain et le vin, c’est-à-dire la communion, on recueillait l’offrande; c’était des dons en nature pour les pauvres, pour la communauté chrétienne, pour les ministres de l’Église. On faisait donc la quête et c’était présenté comme étant dans la logique de ce qu’on venait de célébrer. Le chrétien était conduit, par cette participation sacramentelle au Seigneur, à se livrer à son tour. C’était la conclusion de l’Eucharistie considéré comme un acte de louange et d’action de grâce.

Nous, nous faisons maintenant l’inverse: la quête se fait à l’offertoire. Et on explique aux gens: Vous apportez vos offrandes symboliques (en argent) pour préparer les dons qui serviront à la célébration de la messe. Il ne faudrait pas perdre de vue l’autre dimension, à savoir que, du moment que j’ai reçu le Seigneur, je suis obligé de partir et de me donner; de donner quelque chose de moi, de ma vie, de mon être, de mon travail et de le vivre comme un acte de louange et d’action de grâce au Père à la suite de l’acte du Christ.

 

Prochain article: L’Eucharistie, don de l’Esprit

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Cette série de réflexions sur le mystère eucharistique sont des extraits de conférences données à la communauté par le Père Pierre Michalon, sulpicien de France (1911-2004). Il a été expert au Concile Vatican II dans le Secrétariat pour l’unité des chrétiens et directeur du centre Unité chrétienne à Lyon de 1954 à 1991.